13ème chef de la Maison Gradis depuis Diego Gradis
M Diego GRADIS vous êtes l’un des membres de l’Association les Hénokiens, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
> D.G. : 13ème chef de la Maison Gradis depuis Diego GRADIS (eh oui, Diego !), fondateur de l’entreprise en 1685, on m’a confié les rennes de la société en 2014 et j’espère que ce chiffre « 13 » nous portera bonheur. Etudes de droit à Paris II puis à New York (NYU), Sciences-Po ; après une première carrière juridique comme avocat international à New York puis à Paris, je consacre ma seconde carrière à la solidarité internationale en fondant en 1986 avec ma femme, Christiane, l’ONG internationale « Traditions pour Demain » (www.tradi.info) que nous avons dirigée jusqu’en 2022. Avec Cyril, notre fils, Vice-président de notre Maison, j’ai parallèlement en 2014 démarré une troisième carrière à un âge où beaucoup regardent plutôt vers la sortie, et je m’en réjouis.
Pouvez-nous présenter votre entreprise et ses activités ?
> D.G. : La Maison David Gradis et Fils a eu son siège à Bordeaux jusqu’au début du XXème siècle, puis est devenue la Société Française pour le Commerce avec l’Outre-mer (SFCO) sous la forme d’une société anonyme, avec son siège à Paris. La famille étant dans l’intervalle devenue suisse aussi, la société est reprise en 2024 par Gradis1685 SA, avec son siège dans le Haut-Pays du Canton de Berne.
Pendant des siècles, la Maison Gradis s’est consacrée en tant qu'armateur, au commerce de denrées agricoles, notamment le sucre avec les Antilles, et à une certaine époque avec le Québec également.
Pendant le dernier quart du XXème siècle, la SFCO renoue avec une partie de son passé : le commerce des grands crus bordelais. Ce chapitre de son histoire refermé, elle se consacre à la gestion d’investissements financiers et, depuis 2014, à des investissements directs dans des affaires de dimension moyenne ayant un fort impact social et environnemental, notamment en Amérique latine. Bien que figurant parmi les plus vieux Hénokiens, la SFCO n’en est pas moins probablement un des plus petits en taille!
Quels sont pour votre entreprise les faits marquants de ces dernières années ?
> D.G. : Depuis la transmission de la société et sa direction aux nouvelles générations en 2014, le fait le plus marquant a été une orientation claire de la gestion vers la finance durable.
Pouvez-vous nous dire quelques mots sur vos projets majeurs à plus ou moins longs termes ?
> D.G. : Depuis la passation de pouvoir, l’engagement de la société sur des investissements ou des activités à impact social, et responsable, paraît clair. L’objet social de la société, qui est très large, permet d’envisager tout type d’activité.
Quelles sont les raisons qui peuvent expliquer la longévité de votre entreprise ?
> D.G. : La bonne santé financière de la société résultant en partie d’une gestion plutôt prudente, malgré évidemment quelques vicissitudes passagères à certaines époques, ont certainement contribué à la longévité. Ce qui a sous-tendu cette bonne santé a aussi été l’attachement à des valeurs transmises de génération en génération.
Elles ont été une sorte de fil rouge dans les activités de la société comme dans sa direction : recherche d’un consensus intergénérationnel et auprès de parties de la famille non directement associées à la prise des décisions au quotidien, l’ouverture sur l’outre-mer, le respect et la reconnaissance au personnel, la collaboration avec différents secteurs de la société, du monde des affaires et de la politique sans préjugé ni idée arrêtée, la participation à la vie de la cité ainsi qu'une contribution philanthropique et intellectuelle à ses activités. Il semble que les contacts personnels des dirigeants de la Maison Gradis dans des secteurs variés et à des niveaux divers aient également contribué à la consolider vis à vis du monde extérieur, comme à l’interne.
Les valeurs traditionnelles qui font la force de votre entreprise constituent-elles également un atout en matière de recherche et d’innovation ?
> D.G. : Sans aucun doute, l’assise de la Maison Gradis autour de ses valeurs a encouragé et permis des évolutions dans ses activités. Ainsi, lorsque nos affaires de commerce de vin ont « repris » en 1975, c’était en partie grâce à un contact de la société à Bordeaux. Cette personne proposait d’intervenir comme intermédiaire avec un de ses clients anglais, et lui présenter un acheteur adossé à ces valeurs. L’acheteur fut la SFCO.
Quels sont, selon vous, les pièges les plus importants auxquels votre entreprise doit faire face pour conserver son indépendance ?
> D.G. : Eviter une trop grande dilution du pouvoir de décision au sein de l’entreprise, mais toutefois en associant un cercle familial représentatif aux décisions, et en le tenant régulièrement informé. Cela soude la cohésion familiale qui ne doit cependant pas reposer que sur l’entreprise, mais sur d’autres actions communes, philanthropiques par exemple.
La volonté de votre famille de garder l’entreprise indépendante a-t-elle nécessité au fil des siècles des choix difficiles. Si oui, pouvez-vous nous en citer quelques uns ?
> D.G. :
La nouvelle génération est-elle déjà dans l’entreprise ?
> D.G. : Oui, Cyril GRADIS (sur la photo), né en 1989, seul détenteur du nom Gradis à sa génération, est Vice-président de la société et siège au Conseil d’administration. Nous conduisons ensemble les activités de la société. Lui et son épouse, Janina, ont deux fils ce qui laisse présager un avenir solide à la Maison Gradis.
Auriez-vous un message à communiquer à toutes celles et ceux qui voudraient se lancer dans la création de leur entreprise familiale ?
> D.G. : Faites-le, mais prenez toutes les précautions possibles. C’est un beau projet mais on joue avec le feu. Les dégâts collatéraux peuvent être à la hauteur des très grandes joies que peut procurer le vécu d’une entreprise familiale. Il faut beaucoup de patience, de souplesse, de transparence et de modestie.